Il s’agissait d’une charmante journée ensoleillée, en novembre 1963, à Dallas. Dereck, l’estomac noué, attendait un coup de fil de la part de son acolyte, Lee, en fredonnant une comptine : « Happy birthday, happy birthday… ». Il repensa à la raison pour laquelle il s’apprêtait à commettre un tel acte : la vengeance. En effet, il s’apprêtait à venger l’amour de sa vie. Une petite femme aux cheveux blonds, aux lèvres pulpeuses qui arborait fièrement un petit grain de beauté. Les papillons qu’il avait dans le ventre en pensant à sa dulcinée se transformèrent rapidement en une colère qui fit tressaillir son estomac. Dereck venait de se rappeler ce que l’autre homme, ce salopard, avait fait à sa bien-aimée.
Toujours perdu dans ses pensées, le jeune homme reçut enfin l’appel tant attendu. Il avait le feu vert, tout était en place et le plan pouvait commencer. Il prit alors une profonde inspiration et quitta le coin de la rue où il attendait.
Sur le chemin du parc, son premier point de rencontre, il songea aux répercussions qu’aurait son acte. Il se rassura en se disant qu’il s’agissait d’un crime passionnel, qu’il pourrait enfin redorer l’honneur de celle qu’il aimait tant. Arrivé au parc, il remarqua tout de suite son complice, Lee, accroupi sous un arbre, une housse à la main et une mallette dans l’autre. En quelques pas, il se trouva devant lui, lui prenant des mains ses biens. Avant que Dereck ne reparte, son congénère lui murmura une adresse à l’oreille.
Le voilà maintenant, filant en direction d’un café non loin de là. Il se précipita dans les toilettes, enfila ce qu’il y avait dans la housse, puis, quelques instants plus tard, ressortit vêtu de la tête aux pieds, tel un agent de sécurité.
Il était temps de passer aux choses sérieuses. Dereck s’engouffra dans la foule fébrile qui peuplait la rue. Il réfléchit à ce que Lee avait dû faire à ce pauvre agent de sécurité afin de pouvoir lui fournir le flambant costume qu’il portait. Il apaisa sa confiance en se disant qu’on ne fait pas d’omelettes sans casser d’œufs! Après tout, même les plans les plus méticuleux ont des dommages collatéraux. Son périple dans la foule s’acheva lorsqu’il déboucha devant un très grand immeuble, gardé par deux hommes massifs à l’expression neutre : des agents de sécurité, des vrais! Dereck était préparé à cette possibilité. Fier dans son bel uniforme, il leur indiqua qu’il tentait d’accéder au toit, la position où il avait été assigné. Les colosses crurent son mensonge et le laissèrent passer.
Enfin arrivé sur le toit, il sortit un fusil de sa mallette. Il s’installa sur le rebord, prêt à tirer. En attendant le début de la parade, il se perdit dans ses pensées. Le temps était enfin arrivé, il allait venger celle qui l’obsédait tant. John ne la méritait pas, il ne la voyait pas comme Dereck la voyait et surtout, il ne méritait pas d’être aimé comme elle l’aimait. C’est lui qui l’avait tué. Personne ne pouvait le prouver, mais Dereck en était intimement convaincu. John lui avait volé la prunelle de ses yeux et lui, il allait lui prendre sa vie. Il fredonnait encore la même comptine : « Happy birthday, happy birthday… ».
La parade commença enfin. Il vit la voiture tourner le coin de la rue. Sa bien-aimée était partie trop tôt. Elle avait quitté ce monde avant même de pouvoir rencontrer Dereck, contrairement à lui, qui connaissait tout d’elle depuis sa première apparition au grand écran. La voiture se rapprochait de l’immeuble. Il se remémora le gracieux visage de son idole, Marilyn. C’était pour elle qu’il faisait tout ça, pour la venger! Dereck tira, semant le chaos dans la rue. La prochaine fois que ce cher John F. Kennedy passerait dans cette rue, ce serait dans un cortège funèbre. Il fredonna: « Happy birthday, happy birthday, happy birthday Mister President. »
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