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Bonnes intentions, mauvaise exécution…

Depuis maintenant 42 ans, la DPJ permet à plusieurs enfants de sortir d’un milieu familial indésirable. Le rôle de la DPJ est resté le même avec les années : mettre fin à la situation qui compromet la sécurité ou le développement de l’enfant et éviter que cette situation se reproduise. La direction de la protection de la jeunesse intervient dans plusieurs situations, notamment lorsqu’il y a abandon, négligence, abus sexuels et physiques, mauvais traitements psychologiques, consommation de drogues et plusieurs autres. La DPJ se doit de garder un certain ordre de priorité, car elle reçoit, en moyenne, 363 signalements par jour. De 2021 à 2022, la DPJ a reçu 132 632 signalements et seulement 43 700 ont été retenus, soit 33%. Il est donc nécessaire d’admettre que plusieurs enfants se trouvent prisonniers d’une situation dangereuse et ne peuvent malheureusement pas s’en sortir. Le CUISSS du Centre-Sud-de-l ’Île de- Montréal, possédant une liste d’attente de 463 enfants et seulement 82 intervenants, se doit d’écrire leurs rapports en seulement quelques jours, ce qui démontre à quel point leur charge de travail est immense.

Le travail d’intervenant est définitivement extrêmement demandant et nécessite de ne pas se laisser envahir par les difficultés d’autrui. Il demande une certaine empathie, sans tout de même développer de la sympathie pour les clients. Plusieurs intervenants trouvent difficile de ne pas s’inquiéter pour leurs propres enfants alors qu’ils sont spectateurs de telles situations. La capacité d’adaptation est également essentielle, car aucune journée n’est semblable et chaque cas nécessite quelque chose de différent.

L’horaire de travail peut être très difficile, car plusieurs intervenants doivent être présents en tout temps. Les intervenants de la DPJ et les éducateurs sont toutefois extrêmement dévoués et le désir d’aider les gens les pousse à continuer. La valorisation que leur apporte ce métier n’est cependant pas suffisante, car ce milieu professionnel a un manque important de main-d’œuvre. Il y a non seulement pénurie de professionnel, mais il y a aussi pénurie de familles d’accueil. C’est pourquoi plusieurs enfants ne réussissent pas à être sauvés avant qu’ils ne décèdent ou que certains enfants fuient leur habitation de manière non sécuritaire. Il est donc nécessaire que la DPJ mette en place des solutions pour recueillir plus d’employés. Comme dit précédemment, le métier d’intervenant est extrêmement demandant et difficile. Il est donc très difficile d’attirer les gens vers ce métier.

Nous avons demandé à Stéphanie Gosselin, une travailleuse dans ce domaine, de nous expliquer la situation avec son point de vue interne, en tant qu’intervenante faisant partie d’une équipe de crise dans un CLSC. Cette femme est un modèle de résilience pour tous les gens qui la côtoient puisqu’elle consacre sa vie à aider les jeunes adolescents en besoin depuis maintenant 25 ans. Elle a également exercé la profession d’intervenante en prévention de la toxicomanie dans les écoles secondaires et de superviseur de stages en Éducation spécialisée au réputé Collège La Salle. En tant qu’intervenante, Stéphanie trouve extrêmement frustrant de travailler aussi fort sur des signalements qui ne seront pas retenus faute des ressources humaines. Beaucoup d’impuissance est ressentie à travers tous les travailleurs de ce milieu. Il serait dommage que les intervenants commencent à bâcler leur travail, car ils savent que leurs longues heures de travail ne mènent à rien. Le nombre de preuves ou d’éléments qui doivent être présentés pour démontrer que les enfants sont réellement en danger est beaucoup trop élevé. Ainsi, plusieurs signalements faits sont « incomplets » puisqu’ils ne contiennent pas assez de preuves et ne peuvent donc pas être retenus. Heureusement, Madame Gosselin est attitrée à une répondante de la DPJ dans le cadre de son emploi, mais ce n’est pas le cas de plusieurs personnes souhaitant faire un signalement.

Au niveau de la DPJ, le peu de main-d’œuvre et de familles d’accueil sont parmi les causes les plus importantes de cette problématique. L’autre cause très proéminente est l’important taux de signalements puisqu’il y a eu une augmentation de 12,5% de ceux-ci en seulement 2 ans. Environ 26% des enfants au Québec ont subi de la violence physique mineure à au moins une reprise et 7% d’entre eux en subissent de manière répétitive. Bien sûr, ces cas de violence familiale ne sont pas tous signalés, mais il est nécessaire d’admettre que plusieurs enfants sont présentement en attente d’un retour sur un signalement fait depuis des mois. Il est donc nécessaire que cette situation alarmante soit réglée afin d’aider tous ces jeunes enfants québécois, qui sont en détresse depuis trop longtemps et qui sont extrêmement vulnérables aux idées suicidaires, aux troubles de santé mentale et à l’addiction aux drogues et à l’alcool.

 

Reportage réalisé par Sandrine et Frédérique Viens

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