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La bibliothèque des morts – Partie 4(Fin)

Partie 4

***

-C’est bien le cas, ajouta le garçon fée, ces deux jeunes filles sont arrivées environ une demi-heure plus tard.

-Les filles, demanda la femme, comment êtes vous arrivée jusqu’ici?

Anna et Lizzy échangèrent un regard de consultation et Lizzy prit la parole:

-Eh bien, quand la vieille dame est repartie avec nos amis, un monstre est entré dans la pièce… sauf que soudainement, il s’est transformé en un tas de poussière. Ensuite, on a, en quelque sorte, défoncé le mur et un chemin de pierre est apparu. On a suivi la route et on est arrivé ici.

Pendant une seconde, la dame sembla réfléchir. Elle se tourna vers le garçon fée.

-Carlos, reconduis ces jeunes filles à leurs amis, s’il te plaît, dit-elle à l’intention du garçon fée.

-Bien sûr, votre majesté.

Le garçon fée, qui se prénommait finalement Carlos, conduisit les filles à l’extérieur du palais. La foule de questions qui auraient pu envahir les pensées de Lizzy et Anna était, en fait, refoulée par le fait qu’elles allaient enfin voir leurs amis. Seulement quelques minutes après que le trio ait quitté le palais, il arriva devant une grande maison de pierre blanche. Dans le jardin devant, deux petites filles jouaient sur une balançoire. Quand elles virent Anna, elles se jetèrent dans ses bras en pleurant. Toutes les deux commencèrent à raconter tout ce qui s’était passé depuis que la vieille dame était entrée dans la bibliothèque. Carlos les calma et leur proposa de retourner à l’intérieur pour annoncer l’arrivée des deux filles aux autres, ce qu’elles firent tout en entraînant Lizzy et Anna avec elles. Dès qu’elles entrèrent dans la maison, les autres enfants débarquèrent de tous les côtés pour accueillir les nouvelles arrivantes. Derrière le  groupe d’enfants, un homme dans la trentaine entra dans la pièce. L’homme avait de belles ailes blanches et un sourire bienveillant. Au moment où Lizzy croisa le regard de cet homme, une terrible migraine la prit d’assaut. Des souvenirs d’une vie qu’elle avait oubliée. Sa vie. Et maintenant tout lui revenait. Son enfance, ses parents, son frère, qui ressemblait étrangement à Sam, ses amis, son école… Absolument tout. Le dernier souvenir qui passa devant les yeux de Lizzy était assez troublant. Elle était dans un autobus scolaire, Sam était assis à côté d’elle. D’autres jeunes de son âge étaient dans l’autobus. Une dame à l’avant réclamait plus de calme, mais personne ne l’écoutait, ce qui faisait beaucoup rire Sam. Soudain, une fille poussa un cri assourdissant en pointant quelque chose à l’avant. Ce quelque chose était une camionnette qui fonçait droit sur l’autobus. La panique s’installa dans le véhicule. Le chauffeur n’essaya même pas d’éviter la camionnette et accéléra, comme pour en finir plus vite. Une seconde avant l’impact, Lizzy ferma les yeux, pour ne jamais les rouvrir.

Quand la jeune fille reprit conscience, elle était allongée dans un lit et Sam lui tenait la main. Bien que son mal de tête ne puisse plus être qualifié de migraine, une douleur persistait dans sa tête. Lizzy ouvrit péniblement ses yeux et tenta de se relever, mais Sam l’en empêcha.

-Tu dois rester allongée encore dix minutes au moins.

-Sam… où est-ce qu’on est?

-On est dans l’au-delà…

-Dans l’au-delà…? Ça veut dire qu’on est… morts?

-Oui, tu te souviens, l’accident d’autobus? On y était ensemble.

-Oui, je me souviens…

-Bon, repose-toi maintenant, je vais revenir te chercher dans cinq minutes.

Sur ces dernières paroles, Sam quitta la pièce et laissa Lizzy avec une foule de questions. Elle était morte? Apparemment, oui. Comme à son habitude (car, elle se souvenait qu’elle faisait souvent cela), elle n’écouta pas Sam et sortit du lit avant que celui-ci ne revienne la chercher. Elle s’approcha de la fenêtre et regarda à l’extérieur. Des enfants jouaient avec l’homme aux ailes blanches dans le jardin. Lizzy se demanda pourquoi il était là, puis elle se rendit compte que c’était sûrement à cause du fait qu’il n’y avait que des enfants dans le groupe, dont certains étaient très jeunes. Elle resta à la fenêtre quelques instants encore puis décida d’aller explorer sa nouvelle maison.

Elle commença donc, en toute logique, par sortir de la chambre où elle se trouvait et tomba sur un grand balcon intérieur qui donnait sur le rez-de-chaussée. Sur le balcon, il y avait une série de portes qui, comme le supposait Lizzy, donnait sur des chambres. En continuant son exploration, elle trouva la cuisine, le salon, quelques salles de bains ainsi que plusieurs autres pièces sans aucune particularité. La maison était chaleureuse et donnait l’impression d’être pleine de vie, ce qui était plutôt vrai. Lizzy finit sa visite par la cour extérieure de la maison, là où les enfants jouaient. Il y avait des balançoires, une petite fontaine, des fleurs et des arbres qui faisaient de l’ombre sur le terrain. Et ce n’était pas seulement le décor qui était magnifique, mais aussi le sourire sur le visage de tous les jeunes présents. Rory jouait avec une petite fille et un petit garçon au ballon, Anna et Sam poussaient chacun un enfant sur les balançoires. Bref, le calme et la joie régnaient.

Pourtant, quelque chose sembla déranger la créature ailée qui veillait sur le petit groupe lorsque les nuages commencèrent à couvrir le ciel. Peut-être était-ce à cause du fait qu’un orage arrivait et qu’il faudrait bientôt couper le plaisir des enfants pour rentrer à l’intérieur de la maison en sécurité, mais non, c’était autre chose. Ces nuages avaient l’air plus menaçants que des nuages normaux, plus dangereux. Quand le vent se leva, l’homme ailée fit entrer tout le monde à l’intérieur en disant aux plus réticents qu’il avait une surprise pour eux. Ce qui était plutôt vrai car, comme par magie, plusieurs petits lapins en chocolat firent leur apparition dans la maison. Pendant que les enfants mangeaient leur friandise, on entendit quelqu’un cogner à la porte. Le gardien du groupe voulut ouvrir la porte, mais Lizzy fut plus rapide. Au moment où la jeune fille ouvrit la porte, un Carlos en panique entra dans la maison.

-C’est la catastrophe!!! Les démons ont réussi à passer les portes de la ville et se rapprochent de plus en plus du palais! Vous devez…

Avant que Carlos ait pu finir sa phrase, le sol trembla si fort que la plupart des meubles se renversèrent et que des fissures apparurent sur les murs. La plupart des enfants se mirent à pleurer, même les plus vieux cédaient à la panique. Mais Carlos et la créature ailée perdirent définitivement le contrôle quand une énorme bourrasque de vent brisa en mille morceaux les fenêtres et que la porte d’entrée s’ouvrit en une grande volée. Au même moment, des monstres envahirent les rues. Ils couraient à la recherche de proies, d’âmes à dévorer. Au fur et à mesure que les monstres avançaient dans la ville, la tempête se faisait violente. Le tonnerre grondait et les éclairs frappaient chacun leur tour les plus hautes structures de la ville. Les horribles créatures avaient réussi à dévorer l’âme de plus de la moitié des créatures de la ville, y compris celle de plusieurs des enfants du groupe de bibliothèques, qui s’étaient tous enfuis chacun de leur côté à l’apparition des premiers monstres. Le chaos était présent dans toute la ville. Le sol tremblait, les maisons s’effondraient et les rues se fissuraient de toute part.

Il n’y avait plus aucun espoir de s’en sortir. Lizzy n’avait aucune idée où elle pouvait bien être. Ce n’était qu’une question de secondes avant qu’elle aussi disparaisse à tout jamais. Et ces secondes s’écoulèrent rapidement puisqu’avant même qu’elle ait pu le voir, un monstre se jeta sur la jeune fille et aspira son âme, comme celle de tant d’autres gens. Le corps de Lizzy tomba au sol, comme une feuille tombant de son arbre à l’automne, puis elle s’évapora, comme si elle n’avait jamais existé.

Le sort que subit Lizzy fut le même sort que tous les autres habitants de l’au-delà. Un sort terrible qui était désormais réservé à toutes les âmes arrivant dans ce pays qui était censé être un endroit de joie et de paix, où l’on pouvait se reposer après avoir vécu sa vie, qu’elle eût été longue ou courte, pleine de bonheur ou malheureuse. Mais maintenant, la paix avait fait place au chaos, et ce, pour l’éternité.

La fin.

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